Partage de photos et vidéos de votre enfant sur les réseaux sociaux : quels sont les risques ?

25 août 2025

La publication de photos et de vidéos de mineurs sur les réseaux sociaux (ou sharenting) pose la question de la responsabilité des parents. Elle a des incidences sur la vie privée de leurs enfants. Quels sont les risques et quels sont les réflexes à adopter ?

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des parents français ont déjà partagé sur les réseaux sociaux du contenu sur leurs enfants.
Source : Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique (OPEN)-POTLOC, 2023

Le partage de vidéos ou de photos de vos enfants sur les réseaux sociaux n’est pas un acte anodin et comporte de nombreux risques.

D’une manière générale, la CNIL déconseille fortement de partager des photos ou des vidéos de vos enfants ou petits-enfants sur les réseaux sociaux, surtout lorsque votre profil est public. Si malgré tout, vous souhaitez le faire, la CNIL vous donne les bonnes pratiques à respecter pour limiter les risques.

Quels sont les risques à publier l’image de votre enfant sur les réseaux sociaux ?

Histoires vécues…

La CNIL est régulièrement saisie de plaintes comme l’illustrent ces exemples :

  • Un mineur s’est adressé à la CNIL pour faire retirer des photographies, vidéos et enregistrements vocaux diffusées par ses parents sur un réseau social.
  • Des parents ont appelé l’attention de la CNIL sur les difficultés qu’ils rencontraient à faire cesser la diffusion de photographies du baptême de leurs enfants mineurs.

La CNIL accompagne les plaignants dans leurs démarches afin d’obtenir la suppression des images et vidéos publiées.

L’image de votre enfant peut être détournée à des fins malveillantes

Les vidéos et photos postées sur les réseaux sociaux peuvent faire l’objet de détournement par des individus malveillants. Certains parents publient des photos dénudées de leur enfant (par exemple lorsqu’ils jouent dans le bain) : des internautes malveillants détournent ces photos pour créer de faux profils, les partagent avec d’autres inconnus ou les diffusent sur des réseaux de pornographie infantile. Ces individus malintentionnés peuvent récupérer les images sans qu’ils n’aient besoin d’être dans vos contacts soit parce que votre profil est public, soit parce que l'un de vos contacts les aura partagées publiquement ou avec d'autres « amis ».

Par ailleurs, le développement de systèmes d’intelligence artificielle facilite la création d’hyper-trucages (ou de deep-fake) permettant, par exemple, de dénuder les mineurs à partir de photographies publiées sur les réseaux sociaux. Il s’agit d’images, photos et vidéos générées à partir d’autres contenus d’enfants (y compris habillés), présents sur les réseaux sociaux, par exemple. Cela a pour effet d’augmenter les dangers pour les enfants en ligne et hors ligne.

En effet, cela peut :

  • alimenter le harcèlement scolaire et le cyberharcèlement ;
  • amplifier les pratiques pédocriminelles. À cet égard, la Fondation pour l’enfance alerte notamment sur le développement de nouveaux usages pédocriminels liés à l’IA et la démultiplication de contenus pédocriminels sur le dark web (internet clandestin), mais aussi sur les pages internet accessibles au public.

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des images ou des vidéos d'enfants échangées sur les forums pédocriminiels ont été initialement publiées par leurs parents via les réseaux sociaux

Source : Rapport de la Fondation pour l’Enfance, L'IA générative, nouvelle arme de la pédocriminalité, oct. 2024

La publication d’une image peut révéler d’autres informations sur vos enfants

Une image prise depuis un smartphone ou un appareil photo contient des données qui peuvent révéler beaucoup d’informations sur votre enfant.

En effet, souvent les photos et vidéos contiennent des indications sur la localisation et l’heure à laquelle l’image a été prise (grâce aux métadonnées, notamment du GPS, d’une photo ou vidéo). Les images peuvent également révéler des informations précieuses sur vos enfants – comme leurs centres d’intérêts ou encore les lieux qu'il fréquente – qu’il n’est pas non plus souhaitable de mettre entre les mains d’un individu malintentionné.

La création d’une identité numérique peut porter préjudice à vos enfants sur le long terme

Dès le plus jeune âge, certains enfants se voient attribuer une « identité numérique » contenant potentiellement des centaines de photos qu’ils pourront difficilement effacer une fois adultes. Ainsi, selon une étude menée par l’agence britannique OPINIUM et publiée en 2018, les parents d’un enfant de 13 ans ont déjà publié en moyenne 1 300 photos de lui sur les réseaux sociaux.

Il est parfois difficile de mesurer l’ampleur et les conséquences des traces laissées sur nos enfants pour l’avenir. Ce qui ne pose pas de souci aujourd’hui pourrait paraître inacceptable demain. Toujours accessibles, les photographies et les vidéos partagées par les parents peuvent donc priver les enfants de leur capacité à définir leur propre image et leur identité. Elles peuvent porter atteinte à leur réputation en ligne (avec un risque de cyberharcèlement) et avoir des incidences négatives dans un cadre scolaire ou dans leur avenir personnel et professionnel.

Quelles sont les bonnes pratiques à adopter ?

Pour que vos enfants ne soient pas confrontés aux risques liés au « sharenting », la CNIL vous livre des conseils sur les bonnes pratiques à adopter.

Privilégiez le partage par messagerie instantanée, par courriels ou par MMS

Évitez de partager des photos et des vidéos de votre enfant sur les réseaux sociaux : privilégiez le partage par messagerie privée instantanée sécurisée dont certaines proposent même des fonctionnalités qui vous permettent d’envoyer des messages éphémères. Le courrier électronique ou les MMS doivent également être privilégiés.

Ne partagez pas les images de votre enfant avec tous vos abonnés sur les réseaux sociaux, alors que vous pouvez les transmettre à vos proches de manière privée. N’hésitez pas à demander à vos proches de ne pas partager eux-mêmes les photos ou vidéos de votre enfant sur les réseaux sociaux sans votre accord.

Demandez l’accord de votre enfant et de l’autre parent avant toute publication

Avant de publier une photo ou une vidéo de votre enfant sur les réseaux sociaux, il est nécessaire d’en parler avec lui et d’obtenir son accord.

Vous devez également demander l’accord de l’autre parent. Plusieurs décisions de justices établissent clairement que diffuser des photographies de ses enfants, notamment sur les réseaux sociaux, est un acte non habituel qui nécessite l’accord des deux parents.

Le droit à l’image de l’enfant, un droit renforcé par la loi

La loi du 19 février 2024 est venue renforcer la protection du droit à l’image de l’enfant :

  • les parents doivent veiller au respect de la vie privée de leur enfant, y compris son droit à l’image. Ils associent l’enfant à l’exercice de son droit à l’image, selon son âge et son degré de maturité.
     
  • en cas de désaccord entre les parents, le juge aux affaires familiales peut interdire un parent de diffuser toute image de son enfant sans l’autorisation de l’autre parent.
     
  • lorsque la diffusion de l'image de l'enfant par ses parents porte gravement atteinte à sa dignité ou à son intégrité morale, une délégation partielle forcée de l’autorité parentale est créée. 

Évitez le partage de certaines photos et vidéos et cachez le visage de votre enfant

Si vous décidez de publier des photos et vidéos de votre enfant, faites le tri.

Évitez la publication de certaines photos et vidéos qui ont trait à l’intimité de votre enfant (par exemple, une photo où il serait en maillot de bain ou encore dans son bain).

Il est également conseillé de cacher le visage de votre enfant (photographier votre enfant de dos, ajouter une émoticône sur son visage, etc.) avant de publier.

Sécurisez vos comptes et réduisez la visibilité de vos publications

Verrouillez vos comptes sur les réseaux sociaux en réglant la visibilité de vos publications à vos seuls abonnés pour éviter qu’un inconnu ait accès aux photos ou vidéos de vos enfants. 

Pour chacun des réseaux sociaux, vous pouvez configurer les paramètres de confidentialité de votre compte pour limiter la visibilité de vos publications.

Sur smartphone

  • Accédez à votre profil (en bas à droite de l’écran, puis sur le bouton Menu « ☰ » en haut.
  • Sélectionnez ensuite « Paramètres et confidentialité » puis « Confidentialité » 
  • Vous pouvez alors régler votre compte sur « compte privé »
  • Vous pouvez également activer l’option « Historique des vues du profil ». Pour cela, retournez sur « Confidentialité » puis sélectionnez « Vues de publication ».

Sur ordinateur :

  • Cliquer sur « … Plus »
  • Appuyer sur l’icône « Paramètre » puis sur « Politique de Confidentialité » ;
  • Vous pouvez alors régler votre compte sur « compte privé ».
  • L’option « Historique des vues du profil » ne peut être activée depuis l’ordinateur. Pour l’activer, il faut passer par l’application via le smartphone.

Sur smartphone

  • Accédez à votre profil, puis descendez jusqu’à la rubrique “Qui peut voir votre contenu” et sur “Confidentialité du compte” 
  • Cochez la case à côté de « Compte privé » ;
  • Cliquez sur « Passer à un compte privé » pour confirmer.

Sur ordinateur :

  • Accédez à votre profil, puis allez dans « Options » en haut à droite, cliquez sur « Paramètres et confidentialité » ;
  • Dans la rubrique « Qui peut voir votre contenu », cochez la case à côté de « Compte privé » et cliquez sur « Passer à un compte privé » pour confirmer.

Sur smartphone :

  • Accédez à votre profil, puis cliquez sur le menu en bas à droite, puis cliquez sur « Paramètres et confidentialité », puis « Paramètres » et aller sur « Paramètres d’audience par défaut » ;
  • Vous pouvez alors entre autres :
    • rendre votre compte privé, en cliquant sur « followers et contenu public » et en désactivant l’option « public » ;
    • gérer qui peut voir vos publications sur « amis » ou « moi uniquement » ;
    • désactiver le partage de stories et de reels pour les personnes qui vous suivent. Si votre compte est public, tout le monde a accès à vos stories.

Sur ordinateur :

  • Accédez à votre profil, puis cliquez sur votre photo de profil en haut à droite, puis cliquez sur « Paramètres et confidentialité », puis « Paramètres d’audience par défaut » ;
  • Vous pouvez alors entre autres :
    • gérer qui peut voir vos futures publications sur « amis » ou « moi uniquement » ;
    • limiter la visibilité de vos anciennes publications sur votre journal.

Sur smartphone

  • Appuyez sur votre photo de profil, sur « Paramètres et confidentialité » puis sur « Confidentialité et sécurité ».

Sur ordinateur :

  • Cliquez sur l’icône « (…) » puis  sur « Paramètres et confidentialité » puis sur « Confidentialité et sécurité ».
  • Dans les deux cas, vous pouvez alors entre autres :
    • protéger vos Tweets, c’est-à-dire limiter la visibilité de vos tweets aux personnes qui vous suivent ;
    • régler qui peut vous identifier sur les photos.

Faites le tri dans vos abonnés et dans vos photos et vidéos publiées

Faites fréquemment le tri dans vos abonnés sur vos réseaux sociaux pour éviter d’être suivi par des personnes que vous ne connaissez pas.

Si possible, classez vos abonnés en plusieurs catégories (amis proches, connaissances, famille, etc.) : vous pourrez ainsi décider de ne partager les photos ou vidéos de vos enfants qu’à certains groupes.

Bon à savoir : sur Instagram, vous pouvez faire un groupe constitué de vos « amis proches », ce qui vous évite de partager des contenus sur vos enfants à tous vos abonnés.

Triez régulièrement vos photos et vidéos partagées sur les réseaux sociaux : cela vous permettra de supprimer les photos de votre enfant qui ne sont plus d’actualité.

Quels sont les droits de vos enfants ?

Depuis 1989 et la Convention internationale des droits de l'enfant, chaque mineur a le droit de « préserver son identité, son nom et ses relations familiales ». Il doit aussi être préservé des « immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée » et les « atteintes illégales à son honneur et à sa réputation ». 

Le droit à l'image est un droit jurisprudentiel qui découle du droit au respect de la vie privée prévu à l'article 9 du code civil. Le droit à l’image des enfants doit par ailleurs être protégé par ses parents (voir encadré plus haut).

Vos enfants ont le droit au respect de leur vie privée et disposent d’un droit à l’image.

Les photos et vidéos de vos enfants sont des données personnelles. Gardez à l’esprit que votre enfant mineur a des droits numériques sur ses données. Il bénéficie même d’une protection renforcée.

En France, ce sont les parents (représentants légaux) qui exercent, en principe, les droits du mineur, et notamment :

  • son droit d’accès, qui permet de connaître les données qu’un organisme détient sur le mineur ;
  • son droit de rectification, c’est-à-dire le droit de demander la correction de certaines informations inexactes, obsolètes ou incomplètes à propos du mineur ;
  • son droit à l’effacement, soit la possibilité de demander la suppression des données personnelles du mineur ;
  • son droit d’opposition, qui permet de refuser que certaines données personnelles du mineur soient utilisées par un organisme pour un objectif précis.

La CNIL estime cependant que les mineurs doivent pouvoir exercer directement les droits relatifs à leurs données personnelles sur les réseaux sociaux. Cette capacité d’agir de manière autonome est sans préjudice de la possibilité pour les parents d’exercer les droits au nom de leur enfant et de l’accompagner dans cette démarche.

À noter que les enfants peuvent également agir contre leurs parents en cas de non-respect de leurs droits par ces derniers. En 2018, un adolescent de seize ans a ainsi porté plainte contre sa mère pour violation de sa vie privée. Le tribunal de Rome a ordonné à la mère de l’enfant d’arrêter de poster des photos de son fils sur les réseaux sociaux, sous peine d’amende.

Faire supprimer des photos ou des vidéos en ligne

Si les photos ou vidéos que vous avez publiées de vos enfants sur vos réseaux sociaux ont été réutilisés sans votre accord vous pourrez exercer, au nom de votre enfant, ses droits et notamment son droit à l’effacement. De la même manière, vos enfants peuvent demander l’effacement des photos ou vidéos les concernant sans votre accord.

Le réseau social devra alors effacer les données personnelles collectées dans le cadre de ses services, dans les meilleurs délais.

En cas d’absence de réponse ou d’action vous pouvez :

  • contacter la police ou la gendarmerie si la photo ou la vidéo met en danger immédiat l'enfant ;
  • contacter le 3018 si la photo ou la vidéo de votre enfant est utilisée à des fins de cyberharcèlement ;
  • en l’absence de réponse du réseau social ou en cas de refus de sa part, adresser une plainte à la CNIL dans un délai d’un mois après la date de la demande, en joignant une copie des démarches effectuées auprès du site ; et/ou
  • si le contenu est illicite (par exemple, dans le cas d’un détournement malveillant), le signaler sur la plateforme « Pharos ».

Une règlementation pour renforcer la protection des mineurs en ligne

En France, le législateur a déjà renforcé la protection des mineurs en ligne afin de répondre à des enjeux particuliers tels que l’exploitation commerciale de l’image des mineurs, le cyberharcèlement,  la généralisation du contrôle parental ou encore le respect de l’image des enfants vis-à-vis de l’utilisation qui peut en être faite par les parents, qui est expliqué sur le site « Vie Publique »

Enfin le règlement sur les services numériques, précisé par des lignes directrices récemment publiées par la Commission européenne, impose de nouvelles règles aux plateformes de réseaux sociaux afin de renforcer également la protection des mineurs en ligne.